Levrette story
De tous les mammifères, l’homme est pratiquement le seul à ne pas s’envoyer en l’air uniquement en levrette. Faut-il y voir un signe d’évolution ? Pas nécessairement. Et puis d’abord, faire l’amour par derrière a aussi ses charmes et ses avantages !
Madame et Monsieur Homo sapiens, avant de devenir civilisés, ont-ils commencé leur histoire d’amour l’un derrière l’autre, à quatre pattes dans la caverne conjugale ? Comme des bêtes, quoi ! Certains anthropologues ont en tout cas affirmé que l’Homme n’est véritablement devenu humain que le jour béni où il a eu l’idée de retourner sa femelle pour lui faire adopter la position du missionnaire. D’autres ont prétendu que c’est au contraire la femme qui aurait fait le premier pas. Devenue bipède avant son brouillon de mari, et morphologiquement prête aux ébats de front, Madame Homo sapiens aurait ainsi pris l’initiative du face-à-face amoureux, faisant du coup accomplir à l’espèce un saut évolutif décisif. Cette idée popularisée par Jean-Jacques Annaud dans La Guerre du feu a cependant du plomb dans l’arrière-train. Le basculement du bassin et des organes génitaux féminins qui rend la position du missionnaire possible, date en effet probablement d’au moins trois millions d’années, soit bien avant l’apparition de notre espèce !
Ève prend la pose
Tout cela n’a l’air de rien, mais une véritable polémique va enfler durant le deuxième tiers du XXe siècle : levrette préhistorique ou pas ? Beaucoup de paléontologues vont en tout cas jusqu’à exclure tout raffinement amoureux en ces temps lointains et arriérés. Petit exemple : en 1948, l’Allemand Lothar Zotz met la main sur une statuette qui lui paraît représenter un être androgyne, muni cependant d’une belle paire de fesses rebondies et d’une sorte de cylindre conique dans lequel il croit voir un sexe viril. Pour lui, pas de doute : la statuette est inclinée à la manière d’une femme, les fesses soulevées attendent par derrière la rencontre de l’homme. Zotz toujours, croit également voir dans d’autres Vénus paléolithiques sculptées, non pas des dames aux fesses adipeuses (stéatopyges), comme on le pensait jusque-là, mais l’illustration de croupes fortement courbées. Du coup, l’homme est formel : nos ancêtres chasseurs ne cueillaient la femme qu’en levrette ; par-derrière, toujours par-derrière. Depuis, les préhistoriens ont appris à être prudents. On n’a aucune idée de la façon dont nos très lointains ancêtres s’envoyaient en l’air. La seule certitude est qu’ils l’ont fait, et plutôt bien, sinon nous ne serions pas là pour en parler !
Vue d’arrière
Il faut dire à leur décharge, que la levrette est restée vigoureusement condamnée par l’Église durant des siècles. Que disent les curés à leurs ouailles ? Faire l’amour, d’accord, parce qu’il le faut bien, mais seulement in vaso debito (dans le bon récipient) et surtout pas a retro (par-derrière) et more ferarum (comme les animaux). Pour les bons pères, cette position est bestiale, pire, diabolique. Elle donne naissance à des enfants contrefaits, lépreux, infirmes ou monstrueux ! Ailleurs pourtant, la levrette est célébrée et appréciée. Le Kama-Sutra en recommande même plusieurs variantes, dont la plus connue est le congrès de la vache. Pourquoi d’ailleurs ne pas baiser comme des bêtes ? Le bonobo, un de nos cousins singes, fait bien l’amour comme un homme ! Qui plus est, cet agréable retournement de situation ne manque pas d’avantages, dont celui de permettre une vigoureuse et profonde pénétration vaginale ou anale. Selon les sexologues, l’homme y gagne même 2,7 cm de verge en plus ! Si on reproche parfois à la levrette son manque de romantisme, on aurait tort de lui reprocher son manque d’érotisme.
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